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Une clause d’exclusion insérée dans les statuts sans l’unanimité des associés, ce n’est pas anti-constitutionnel

Cons. const. 9-12-2022 n° 2022-1029 QPC

Dans le cadre d’une procédure judiciaire, un justiciable qui cherche à faire reconnaître un manquement à ses droits tente généralement le tout pour le tout.

C’est le cas dans cette affaire de l’associé d’une SAS, qui a tenté de dégainer l’arme constitutionnelle, dans l’espoir de faire invalider son exclusion du capital de la société.

Le contexte : une clause statutaire d’exclusion ayant été mise en jeu contre lui, l’associé d’une société commerciale soutenait devant la Cour de cassation que :

  • l’article L.227-16, al. 1er du Code de commerce, prévoyant la possibilité de contraindre un associé à céder ses actions dans certaines conditions,
  • et l’article L.227-19 du Code de commerce, prévoyant que ce type de clause d’exclusion pouvait être insérée dans les statuts sans recueillir l’unanimité des associés,
  • ne serait pas conforme à la Constitution.

Pour lui, il en résulterait en effet une privation de propriété non justifiée par une nécessité publique légalement constatée, et qui constituerait une atteinte disproportionnée à son droit de propriété.

Pour mémoire, le droit de propriété est en effet consacré à l’article 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, en les termes suivants : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ».

La Cour de cassation a donc saisi le Conseil constitutionnel, le 13 octobre 2022, d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

Dans une décision du 9 décembre 2022, le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions légales précitées sont bien conformes à la Constitution. En effet, le Conseil constitutionnel a identifié les garanties de constitutionnalité suivantes :

  • ces dispositions légales ont pour objet de permettre à une SAS d’exclure un associé en application d’une clause statutaire, et n’entraînent donc pas en tant que telles une privation de propriété,
  • le législateur a poursuivi un objectif d’intérêt général, afin de garantir la cohésion de l’actionnariat d’une SAS et la poursuite de son activité, en évitant les situations de blocage pouvant résulter de l’opposition de l’associé concerné à une telle clause,
  • la décision d’exclure un associé ne peut être prise qu’à la suite d’une procédure prévue par les statuts, ne peut être abusive et doit reposer sur un motif statutaire, conforme à l’intérêt social et à l’ordre public,
  • l’exclusion de l’associé donne lieu au rachat de ses actions à un prix de cession fixé selon les modalités prévues aux statuts (article L.227-18 du Code de commerce) ou, à défaut, soit par un accord entre les parties, soit par un expert (dans les conditions prévues à l’article 1843-4 du Code civil),
  • la décision d’exclusion peut être contestée par l’associé devant le juge, qui apprécie alors la réalité et la gravité du motif retenu et le caractère adapté du prix de cession des actions.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Conseil constitutionnel estime que les dispositions contestées ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit.

Les actionnaires d’une SAS peuvent donc continuer à insérer dans les statuts de la société une clause d’exclusion, selon les usages et pratiques actuellement en vigueur.

Si vous vous interrogez sur l’opportunité ou la façon d’insérer ce type de clause dans vos statuts, Tolma vous conseille !

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